Comment ça va ? Quand pouvons nous prendre un rendez-vous ? Pourquoi vous ne répondez pas ?

J’espère que tout le monde va bien et que personne n’a perdu de proche dans cette période un peu compliquée. Pour l’instant de ce que je vois dans les mails que vous m’envoyez, ça a l’air d’aller, ce qui est rassurant et je croise les doigts pour que cela continue ainsi.

J’avais envie d’écrire aujourd’hui pour aborder quelques petites choses afin de tranquilliser tout le monde.

Comment ça va ?

Tout d’abord merci pour les très très nombreux mails que je reçois. Cela me fait plaisir d’avoir de vos nouvelles et je dois avouer que vous vous êtes surpassés pour me faire sourire et rire ! J’ai bien eu quelques personnes pour qui la notion de confinement semblait un peu floue mais bon, je ne vais pas blâmer une personne qui considère mon activité comme essentielle à la vie de la Nation. Seulement voilà, j’ai la chance de pouvoir me permettre d’être en pause donc je ne souhaite pas prendre le risque de payer une amende (ou de tomber malade, mais ça de toutes façons même après le confinement il y aura ce risque). Par contre j’aimerais vraiment qu’on arrête de taper sur les collègues qui continuent de travailler malgré le confinement. J’ai vu certains hommes dénoncer Untel et Chose car elles continuaient à proposer des rencontres. Je vous assure que les collègues qui font ça ne le font pas ça parce qu’elles s’en fichent, non elles le font car elles ont un loyer, des factures, de la nourriture à payer, comme tout le monde. On a monté des cagnottes et c’est vrai que quand on regarde, on peut se dire qu’elles sont quand même bien remplies. C’est génial de constater cette solidarité qui s’est mise en place. Un énorme merci d’ailleurs à tous ceux qui ont contribué, vous ne pouvez pas savoir à quel point cela m’a fait du bien, à quel point cela m’a soulagé (parce que aller chercher l’argent à droite à gauche a fait parti de mes principales préoccupations durant les premières semaines de confinement et c’était très stressant).

Reprenons donc, les cagnottes. Elles semblent bien remplies, on pourrait se dire que c’est suffisant. La cagnotte de Grisélidis est aujourd’hui à 13 742 euros, c’est super ! Chaque semaine Grisélidis distribue des bons de 30 euros, les premières semaines il y avait 50-60 personnes qui venaient aux permanences pour avoir cette aide. Ce qui fait un besoin de 1500-1800 euros par semaine. Puis c’est rapidement monté à 100, puis 120 personnes, donc 3000 à 3600 euros par semaine. Vous multipliez par le nombre de semaines de confinement et vous constatez qu’on atteint rapidement le plafond. Heureusement on a eu des bons alimentaires et des collectifs qui ont fait des collectes alimentaires spécialement pour les bénéficiaires de l’association, ça nous aide beaucoup.

Bref, tout ça pour dire que même avec ces cagnottes, certaines personnes sont contraintes de continuer les rendez-vous, c’est pas normal mais ce n’est pas en leur tapant dessus qu’on va faire avancer le schmilblick.

Un autre point positif durant cette période de m**** ce fut la couverture médiatique incroyable qu’on a eu. Tous les médias ont parlé de nous, des cagnottes et dans 90% de ces articles/vidéos les personnes interrogées étaient des collègues ou des associations alliées. Ça ne vous parle pas trop peut-être mais il y a quelques années, quand un média voulait parler de prostitution, il interviewait des associations abolitionnistes (ce qui peut se comprendre car ces assos ont aussi une expertise de terrain), des médecins, des psy, des policiers…mais rarement une personne directement concernée. Sauf si cela abordait certaines thématiques bien précises collant aux stéréotypes : l’escort de luxe qui claque un smic par jour en shopping, la personne forcée à se prostituer, étudiante dans le besoin… Bref vous voyez ce que je veux dire. 

Ça n’a pas disparu, il faut régulièrement aller râler sur les journalistes pour qu’ils évoluent mais c’est quand même moins trash qu’il y a quelques années (sauf quand on s’appelle Paris Match, chez eux le respect est clairement mort et enterré depuis un moment).

Voilà, c’était mon point « positivons un peu pendant cette période de m**** »

On peut prendre RDV ?

Certaines personnes me demandent une date pour un rendez-vous après le 11 mai.

Je vais y répondre ici car cela me turlupine un peu. Je veux bien être une personne extraordinaire mais je n’ai pas de dons de voyance. Et je n’ai pas non plus une femme de ménage dont la belle-mère a un frère qui est super ami avec le cousin d’un mec qui travaille au gouvernement et a des informations avant tout le monde. D’ailleurs je n’ai pas de femme de ménage. Je fais mon ménage toute seule comme une grande (mais toujours avec beaucoup de classe).

(Oui c’est un peu la bazar chez moi mais que voulez-vous, j’ai 3 bestioles, ça fait des dégâts)

Donc, dites moi…. Comment puis-je savoir ce qui va être autorisé ou non après le 11 mai ? Quels types de déplacements ? Est-ce que je pourrai prendre le train ? Aller dans un autre département ? Quelle tête aura mon planning personnel ? Comment mes autres activités vont pouvoir reprendre ? Quand les hôtels vont-ils ré-ouvrir ? Et les restaurants ?

On a bien compris qu’ils voulaient le déconfinement à partir du 11 mai mais on ne sait pas du tout à quoi ça va ressembler. Je sais que je vous manque mais patience, cela ne sert à rien de commencer à prévoir des rencontres si c’est pour que tout tombe à l’eau le 11.

Puis, je vais aussi en décevoir certains, j’ai 1000 choses à faire moi quand on aura un peu plus de libertés, je veux revoir mes amis, ma famille, mon coach, mes collègues…et je vais aussi voir en priorité mes chouchous qui me manquent. Je sais que c’est frustrant mais je n’ai pas envie de courir les rendez-vous. Je veux revoir ceux avec qui je suis en relation, fêter nos retrouvailles et si j’ai le temps je verrai les personnes qui veulent me rencontrer pour la première fois.

Vous ne répondez pas à mon mail, ai-je dis quelque chose de mal ?

J’aimerais aussi que vous ne vous vexiez pas si je mets du temps à vous répondre, je ne passe pas mes journées à glander sur Netflix, je travaille beaucoup en réalité (au passage il n’y a aucun mal à passer ses journées devant Netflix, c’est juste moi qui ne supporte pas d’être inactive). D’ailleurs hier a été la première journée depuis le début du confinement où je me suis autorisée à ne rien faire et à regarder une série en mangeant des pop-corn (j’ai enfin retrouvé du maïs à pop-corn, ça a été ma grande joie durant ce confinement).

Nous avons le temps pour les rencontres, on ne peut rien prévoir donc je préfère faire passer en priorité mes projets personnels, mes recherche car j’ai enfin le temps pour m’y consacrer. Actuellement je fais des travaux de recherche avec une amie et cela nous occupe toute la journée, je peux y passer jusqu’à 8h/jour. C’est laborieux : 90% des textes que nous étudions sont en anglais, ils font quelques bonnes centaines de pages et certains datent des années 80-90 donc ils sont difficiles à retrouver. Je ne dis pas cela pour me faire plaindre, j’adore la recherche, c’est juste pour que vous compreniez que je ne suis pas vraiment disponible en ce moment, mon cerveau est à 100% occupé par ça (il m’arrive d’ailleurs régulièrement d’en rêver).

Vous m’envoyez des mails super gentils mais souvent très longs, et j’en reçois plusieurs par jour donc s’il vous plait, laissez moi ce temps pour moi, je vous promets que je répondrai un jour. Je suis ravie d’avoir enfin le temps pour avancer dans cette recherche que j’avais lancé il y a quelques mois. J’ai envie de la finir avant le 11, tout comme j’ai envie de finir mes projets personnels.

Et mon téléphone est aussi éteint jusqu’à la fin du confinement donc si je ne réponds pas à vos sms c’est normal.

Voilà, quoi vous dire sinon ?

Certains se sont mis à faire leur pain maison mais de mon coté j’ai opté pour les pizza maison, ça me manquait vraiment. Ça ne vaut pas une vraie bonne pizza mais ça passe comme nourriture de réconfort après une grosse journée.

J’ai aussi commencé à faire des gâteaux au chocolat et des cookies, je ne sais pas trop pourquoi vu que je ne mange quasiment jamais de sucré mais mon coloc de confinement est ravi lui.

Je me suis découvert une nouvelle passion : les pommes au beurre de cacahuète. Mon entourage me regarde bizarrement mais c’est super bon en fait !

Par contre je suis traumatisée par les poireaux. Durant les premières semaines de confinement, c’était le seul légume qui restait à chaque fois que j’allais faire des courses (avec des blettes, des topinambours et du céleri que je ne sais absolument pas cuisiner). Les légumes c’est 50% minimum de mon alimentation, j’ai mangé des poireaux tous les jours, je n’en peux plus. J’ai même fini par pleurer un jour quand, en rentrant dans l’épicerie, j’ai vu qu’il n’y avait que ça au rayon légume (oui, je suis trop sensible, je sais). Je ne vous raconte pas la tête de mon coloc quand il a voulu savoir pourquoi je pleurais et que je lui ai dit que c’était parce qu’il y avait des poireaux à l’épicerie. Mais mon sacrifice de Tofu a marché car depuis 2 semaines je retrouve enfin de vrais légumes, je peux à nouveau manger des brocolis matin, midi et soir. Tout ça pour vous dire que si vous me faites à manger pendant notre rencontre, je vous en supplie, je ne veux plus voir de poireaux pendant au moins 6 mois !

Je pensais faire court, mais comme d’habitude je m’emballe et je me retrouve à vous parler de nourriture donc on va s’arrêter là car dans pas longtemps je vais vous partager mes nouvelles techniques de nettoyage de ma douche à la brosse à dent !

Je vous souhaite une belle journée et il me tarde de vous revoir

Je vous embrasse